A l’heure où la réindustrialisation française et la souveraineté industrielle sont au cœur des débats, qu’en est-il de la fabrication des panneaux solaires ? Le Triangle décortique pour vous ce marché complexe, en pleine expansion.
La domination asiatique dans la production de modules photovoltaïques
Si jusqu’aux années 2010, l’Europe était un acteur industriel significatif dans la production mondiale de modules photovoltaïques, la Chine domine aujourd’hui à 80 % la chaîne des composants des panneaux. Cette suprématie asiatique s’explique notamment par des coûts de production inférieurs et un accès facile à la matière première (la Chine étant le premier producteur mondial de silicium). Les pays asiatiques ont pris une avance considérable dans la recherche et le développement du secteur photovoltaïque, soutenus par des investissements massifs.
Bien que quelques acteurs européens subsistent, leur capacité de production reste très faible par rapport aux besoins du marché, rendant inévitable l’importation de panneaux solaires étrangers. Les objectifs européens visent à augmenter la capacité solaire installée, passant de 208 GW aujourd’hui à 320 GW d’ici 2025. Pour atteindre ces ambitions, il est crucial d’accélérer notre transition. Alors que l’Europe était capable de suivre la cadence il y a encore quelques années, l’industrie a aujourd’hui pris du retard.
À titre de comparaison, l’Union Européenne a installé environ 56GW de puissance solaire en 2023. Cependant, selon certaines sources, la capacité de production des modules photovoltaïques en Europe serait estimée à 11 GW, dont seulement la moitié serait réellement opérationnelle. Sur cette capacité théorique, les fabricants européens n’ont produit que 2 GW de modules photovoltaïques l’année passée, en grande partie en raison de coûts de production élevés et d’une forte concurrence internationale. En résumé, ces chiffres montrent que l’Europe dépend encore fortement des modules photovoltaïques asiatiques.
Défendre la production Européenne : Ambitions et stratégies pour protéger la filière
Malgré le retard accumulé, la Commission Européenne ambitionne d’atteindre une capacité de production suffisante pour fabriquer 40 % des panneaux solaires installés en Europe d’ici 2030. Le Conseil Européen de l’Industrie Solaire appelle également à la création d’un cadre visant à protéger et à développer ce marché. À l’échelle mondiale, des pays comme les États-Unis, l’Inde et l’Australie ont mis en place des programmes protectionnistes combinant taxes à l’importation et subventions pour soutenir leur industrie. Récemment, Joe Biden a augmenté les droits de douane sur les importations de cellules photovoltaïques chinoises, passant de 25 % à 50 %. Cependant, il serait irréaliste de fermer complètement les frontières européennes au marché chinois, car l’industrie reste, à ce jour, fortement dépendante de ces importations.
Aujourd’hui, il existe moins d’une dizaine d’entreprises dédiées à la conception de panneaux solaires en France, avec une capacité de production limitée à 100 MW par an. Cette activité tend à se développer, notamment grâce à une entreprise émergente située à Fos-sur-Mer qui prévoit la mise en place d’une « gigafactory » de panneaux solaires made in France, de portée européenne. Les fondateurs de cette société promettent un produit français de haute qualité et estiment une capacité de production équivalente à 5 GW d’ici 2025, avec un triplement prévu d’ici 2030. Un projet encourageant que nous suivrons avec attention.
Le positionnement du Triangle
A l’heure actuelle, si nous voulons suivre efficacement la cadence du marché et accélérer la Transition énergétique, nous avons besoin des produits et technologies asiatiques. L’Asie est aujourd’hui le seul acteur capable de répondre aux volumes de production attendus. Cependant, nous restons très attentifs à l’évolution du marché. Nous n’excluons pas d’adapter nos stratégies d’achat et pourquoi pas même, un jour, d’en internaliser la compétence.